Avec Camille Perrier Depeursinge, Professeure de droit pénal

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La justice façonne notre société. Elle protège, punit, mais interroge aussi notre manière de vivre ensemble. Pourtant, ses mécanismes restent souvent méconnus du grand public. Pour inaugurer La Cité, le podcast du Cercle démocratique Lausanne, nous avons reçu Camille Perrier Depeursinge, professeure de droit pénal à l’Université de Lausanne, pour une discussion sur les défis du système judiciaire suisse.

Ce premier épisode explore des questions fondamentales : Quelle place pour les victimes dans la justice pénale ? Que change la nouvelle définition du viol ? Pourquoi la justice restaurative peut-elle être une solution ? Pourquoi le droit suisse évolue-t-il si lentement ?

Le rôle des victimes dans la justice pénale
Contrairement à ce que l’on imagine souvent, un procès pénal ne met pas la victime et l’accusé sur un pied d’égalité. Il s’agit d’un système où l’État juge et sanctionne ceux qui transgressent les lois. « La justice pénale est verticale : elle se concentre sur le coupable, pas sur la souffrance de la victime », explique Camille Perrier Depeursinge.

Les victimes jouent souvent un rôle secondaire dans la procédure. « Elles sont perçues comme des super-témoins plutôt que comme des parties essentielles ». Cette approche, qui met l’accent sur la responsabilité du coupable plutôt que sur la reconnaissance du préjudice subi, peut être frustrante pour celles et ceux qui attendent réparation.

Viol et consentement : un tournant juridique en Suisse
En juillet 2024, une réforme majeure a redéfini le viol en Suisse en intégrant le principe du « non, c’est non ». Jusqu’ici, pour qu’un acte soit reconnu comme un viol, il fallait prouver une contrainte physique ou une menace. Désormais, le simple refus de la victime suffit à qualifier l’infraction.

Cette réforme reconnaît également l’état de sidération, un phénomène qui empêche certaines victimes de réagir face à une agression. « Ce n’est pas un choix, mais une réaction du cerveau pour se protéger », précise la professeure. Pourtant, malgré ces avancées, la majorité des victimes ne portent toujours pas plainte. « Moins de 10 % des agressions sexuelles sont signalées, souvent par peur, honte ou découragement face au système ».

Justice restaurative : une alternative pour mieux accompagner les victimes ?
La justice restaurative offre une approche complémentaire à la justice pénale, en permettant aux victimes et aux auteurs d’échanger dans un cadre sécurisé. « Elle permet aux victimes de poser des questions essentielles à leurs agresseurs et aux auteurs de prendre conscience des conséquences de leurs actes ».

Ce modèle, déjà bien implanté dans d’autres pays, montre des résultats encourageants : réduction du stress post-traumatique des victimes, prise de conscience des auteurs et baisse de la récidive. Pourtant, en Suisse, il reste encore marginal et sans cadre légal clair.

Pourquoi le droit suisse évolue-t-il si lentement ?
La lenteur des réformes en Suisse s’explique par son modèle fédéral et sa culture du consensus. « En Suisse, on consulte beaucoup avant de légiférer : prudence ou lenteur ? », s’interroge Camille Perrier Depeursinge. Cette approche garantit une certaine stabilité juridique, mais peut freiner les évolutions nécessaires, comme l’intégration de la justice restaurative dans le cadre légal.

« Quinze ans après ma thèse, on n’a toujours pas de base légale pour la justice restaurative : frustrant mais révélateur », souligne-t-elle. Un équilibre complexe entre nécessité d’adaptation et crainte des changements trop rapides.

🎧 Écoutez cet épisode dès maintenant !

Dans ce premier épisode de La Cité, Camille Perrier Depeursinge nous aide à comprendre les enjeux majeurs de notre système judiciaire.

Le droit façonne notre société, mais il appartient à chacun de le comprendre et de le questionner.

Bonne écoute !

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