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Félix Bonjour (1858-1942)
Grandes figures vaudoises
Né en 1858 à Vevey, Félix Bonjour est le fils de Louis Bonjour, ami d’Eytel et de Louis Ruchonnet et conseiller d’Etat de 1866 à 1873. Il entreprend des études de lettres à l’Académie de Lausanne, où il fréquente la Société de Belles-Lettres, puis à Bonn et à Strasbourg. Il doit toutefois interrompre son parcours universitaire en 1878. C’est alors qu’il est approché par son parent Ernest Ruchonnet, qui entend proposer son nom à Louis Ruchonnet, sur le point de transformer La Revue en quotidien. Malgré les préventions de Vessaz, qui se souvient avec douleur des articles critiques que le candidat écrivait depuis son lieu d’études dans un journal fribourgeois, Bonjour est nommé directeur et rédacteur du journal. Il le restera jusqu’en 1928.
Bonjour travaille de longues années sous la surveillance étroite de Ruchonnet, qui détermine la ligne éditoriale, téléguide les campagnes politiques, distribue conseils et recommandations, puis de Vessaz, qui ne peut supporter que des responsables du parti utilisent les colonnes de La Revue pour y glisser des opinions contraires à la «doctrine» dont il se considère comme l’unique dépositaire. Dès 1892, déchargé de la pesante tutelle de Vessaz, il laisse libre cours à son talent rédactionnel et s’insère peu à peu dans les organes dirigeants du parti. Président de l’Association de la presse suisse de 1896 à 1898, puis de l’Association de la presse vaudoise de 1904 à 1908 et de 1912 à 1914, il entre au Grand Conseil en 1901 et au Conseil national en 1908. Président de cette dernière Chambre en 1915, il abandonne ses deux mandats législatifs en 1917. Président du parti radical vaudois en 1912, il prend les rênes du parti suisse en 1913.
Sous sa conduite, La Revue acquiert une place importante dans le paysage journalistique, notamment avec la création, au début du XXème siècle, de La Revue du dimanche, confiée à son frère Emile, conseiller communal à Lausanne et conservateur du Musée Arlaud. Bonjour inaugure ainsi une mainmise progressive des radicaux sur la presse. Des radicaux vont s’établir dans les rédactions des grands quotidiens, tout en conservant leurs journaux régionaux, nés dans l’effervescence des luttes politiques du siècle précédent: Pierre Rochat, Rodolphe Rubattel, Eugène Hirzel, Maxime Reymond, Henri Laesser, député dans les années 30, pas rares seront les radicaux de l’entre-deux-guerres à forger leur conscience politique à travers un intense engagement journalistique. Cette tendance déclinera, puis disparaîtra avec l’affermissement des médias indépendants et de plus en plus influencés par l’audiovisuel, après la deuxième guerre mondiale.
Notable du radicalisme au pouvoir, personnage reconnu, docteur honoris causa de l’Université de Lausanne en 1923, Bonjour doit, dès le début des années 20 du XXème siècle, subir les assauts de la jeune garde radicale, patronnée par Paul Maillefer, qui digère mal son échec au Conseil fédéral. Bonjour, qui ne semble pas totalement innocent dans la mésaventure du syndic de Lausanne, doit abdiquer en 1928, lorsqu’il doit céder, non sans amertume, la rédaction de La Revue à Pierre Rochat. Il se vouera dès lors à l’écriture de grands ouvrages, dans le prolongement de ses brochures plus anciennes, sur la démocratie suisse, la politique vaudoise ou l’histoire du percement du Simplon. Il rédigera en particulier ses Souvenirs d’un journaliste, en 1931, ouvrage qui brosse un portrait précieux de son époque, et, surtout, en 1936, une biographie de son maître Louis Ruchonnet qui, bien que largement hagiographique, n’est pas sans valeur. Bonjour décède en 1942.
© Olivier Meuwly, Lausanne 2003