Philippe Jaccottet (1925)

Grandes figures vaudoises


Philippe Jaccottet en 1991 par Erling Mandelmann

Né à Moudon le 30 juin 1925, Philippe Jaccottet se sent très vite aspiré vers la littérature. Installé à Lausanne en 1933 avec sa famille, il compose ses premiers poèmes. Il a 16 ans lorsqu’il rencontre Gustave Roud. Rencontre décisive: sa voie est tracée, il n’en déviera pas.

Etudiant en lettres à l’Université de Lausanne, il écrit une pièce de théâtre puis et fait paraître ses premiers poèmes, comme Elegie, en 1943. Puis c’est le départ à Paris, où l’éditeur vaudois Henry-Louis Mermod lui confie des traductions d’auteurs allemands, qui le fascinent: Thomas Mann, Rilke, Musil. Et première consécration en 1953 lorsque Gallimard publie son recueil L’Effraie. Il rédige aussi des critiques pour la presse romande.

La même année, pour des raisons économiques mais aussi pour s’éloigner du microcosme littéraire parisien, il s’installe avec son épouse à Grignan, dans la Drôme, où il ne cessera d’écrire, de créer, de traduire. Il ne rompt cependant pas avec sa région d’origine, où il conserve de nombreux amis.

Poète du paysage reclus dans la contemplation, à l’abri des vicissitudes d’un monde qui le l’intéresserait pas? José-Flore Tappy, qui a dirigé le volume publié dans La Pléiade, réfute une vision aussi restrictive de l’œuvre de Jaccottet.

Ni conservateur ni révolutionnaire, le poète, peut-être tenté un temps par une forme de nihilisme, ne prôner pas un retour à la nature ou un quelconque non-engagement. Au lieu de se courber devant les idéologies, il préfère entretenir un dialogue constant avec le monde et la littérature. Il aime fouailler les contradictions de la langue, sous une double influence propre aux Romands et qui le nourrit: les cultures française et allemande, qu’il chérit tout autant.

Sa poésie, “propice aux défrichements complexes”, se dévoile ainsi, aux yeux de Christophe Gallaz, comme “rythmée par les mouvements les plus incertains qui façonnent l’être en profondeur, s’érigeant de la sorte en machine de guerre contre tous les autocrates en vigueur autour de nous”.

Son travail de traducteur prend ainsi une nouvelle dimension: Jaccottet apparaît comme un homme du passage, à l’intersection de différents univers. Comme le suggère J.-F. Tappy dans Le Temps, il peut être comparé à un Claudio Magris “par cette indépendance d’esprit, cette identité de la frontière, où la marge crée un décalage fécond”.

Largement reconnu par le public lettré, objet d’une septantaine de mémoire de licence et d’une vingtaine de thèses de doctorat, Prix Rambert en 1956, Philippe Jaccottet appartient désormais au cercle étroit de la quinzaine d’auteurs à avoir été publiés dans La Pléiade de leur vivant.

  • Le Temps du 15.2.2014, L’Hebdo du 13.2.2014, Le Matin-Dimanche du 16.2.2014, 24 Heures du 20.2.2014
  • L’œuvre poétique complète de Philippe Jaccottet est sortie en février 2014 dans La Pléiade, chez Gallimard (édition établie par José-Flore Tappy, avec Hervé Ferrage, Doris Jakubec et Jean-Marc Sourdillon ; préface de Fabio Pusterla)
Publié le 1 janvier 2023

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