François-Louis de Pesmes de Saint-Saphorin (1668-1737)
Grandes figures vaudoises
Né le 16 février 1668 dans le château familial de Saint-Saphorin-sur-Morges, François-Louis reçoit de son père, originaire de Genève, une stricte éducation calviniste. Nourri des récits des persécutions de Louis XIV contre les protestants, il apprend à haïr la France. Eduqué au milieu des vignes, avec une vue imprenable sur les galères qui sillonnent le Lac Léman, il ne pressent cependant que son avenir l’appellera loin de sa terre natale.
Issu d’une famille noble, il n’est pas riche et n’est que sujet de Leurs Excellences. Quel métier choisir? François-Louis se tourne logiquement vers celui des armes, qui l’emmène au service du duc de Brunswick-Lunebourg, puis du landgrave de Hesse-Kassel. Alors qu’il se retrouve sans emploi, le destin vient le happer. Assistant à une querelle dans une auberge entre un Allemand et un Néerlandais, il prend le parti de ce dernier, qui n’est autre que le vice-amiral van Assemburg, grand commis de l’empire autrichien. En guise de remerciement, notre Vaudois se voit recommandé auprès du commandant de la flotte autrichienne, et le voilà, bien que dépourvu de toute formation de marin, capitaine du vaisseau amiral. Il est engagé lors de plusieurs opérations contre les Turcs.
En 1693, van Assemburg prend la tête de la flotte autrichienne, mais les relations avec Saint-Saphorin se tendent dangereusement. Le Vaudois, qui vient de publier un ouvrage de stratégie militaire, se lasse de n’occuper que des fonctions subalternes, même s’il parvient à obtenir le grade de vice-amiral. La campagne de 1796 constitue un tournant: la flotte autrichienne est écrasée.
Le conflit entre Pesmes et son chef atteint son paroxysme et les disputes sur les responsabilités des uns et des autres dans la débâcle se multiplient. Mais le Vaudois se montre plus habile et révèle certaines malversations commises par le Hollandais. Désormais bien en cour, il sympathise avec le flamboyant Prince Eugène, sert sous ses ordres lors d’une nouvelle campagne, où il se distingue, en 1697, manœuvrant brillamment ses navires.
Calviniste à Vienne mais bon vivant et grand lecteur, il décide de prendre du recul et s’adonne à ses passions, herborise, collectionne les livres. Il n’est pas pour autant en retraite. Nommé général-major, consulté par le Prince Eugène, qui le délègue auprès des cantons suisses, mais aussi par la Cour, il entame en 1701, et notamment durant la guerre de Succession d’Espagne, une fructueuse carrière de diplomate, qui lui vaudra le qualificatif de “plus dangereux ennemi de la France”. Talentueux, il sert aussi la Confédération et est sollicité par d’autres puissances: il représentera même la Grande-Bretagne à Vienne. Il décède le 16 juillet 1737 en ses terres vaudoises où il s’était retiré quinze ans auparavant.
Jean-Jacques Langendorf, Ahnengalerie der kaiserlichen Armee 1618-1918, Karolinger, Vienne, 1995. J.-J. Langendorf a rappelé le souvenir de ce Vaudois haut en couleur lors d’un colloque organisé par Nicolas Gex pour le compte du Centre d’histoire et de prospectives militaires en octobre 2013