Paul-René Martin (1929-2002)

Grandes figures vaudoises


Né en 1929 à Lausanne, Paul-René Martin se lance dans des études de droit en même temps qu’il devient Helvétien. Titulaire d’une licence en droit de l’Université de Lausanne, il se tourne ensuite vers l’enseignement privé, puis accepte le poste de chef de l’administration et du personnel de la Station fédérale de recherches agronomiques. Il entre ensuite au service de l’Etat, comme secrétaire général du Département de l’agriculture, de l’industrie et du commerce, que dirige alors le radical Edouard Debétaz. En parallèle, il entame une carrière politique, à l’échelon communal. Elu conseiller communal de sa ville natale en 1966, il est appelé à la Municipalité en 1976. Opposé à un municipal démocrate-chrétien, il l’emporte de justesse devant le Conseil communal. Cette affaire sonnera le glas de l’élection des édiles par les organes délibérants communaux, confiée peu après au peuple.

Martin dirige pendant cinq ans les services industriels de la ville, avant de succéder à Jean-Pascal Delamuraz à la syndicature, en 1981. Il reste en fonction jusqu’en 1989 et marquera son époque par son engagement inconditionnel en faveur du rayonnement culturel de la capitale vaudoise. Sous son égide, le Théâtre de Vidy est mis entre les mains du metteur en scène allemand Thomas Langhoff, l’opéra de Lausanne est doté de moyens qui lui permettent de concevoir d’authentiques saisons lyriques, puis Maurice Béjart est accueilli à Lausanne. Dans un autre registre, il réussit à mettre un terme à la crise ouverte au début des années 80 par des mouvements de la jeunesse contestataire, qui revendiquaient un centre autonome: l’ère de la Dolce vita va démarrer.

Martin veut aussi bétonner l’aura sportive que possède Lausanne comme centre administratif du mouvement olympique. Mais les succès qu’il a accumulés dans sa politique culturelle ne se répètent pas. Alors que Lausanne s’apprête à déposer sa candidature pour l’organisation des Jeux olympiques d’hiver 1994, les écologistes lancent un référendum, qui est accepté en votation populaire. Cet échec incite le syndic à se retirer; la socialiste Yvette Jaggi lui succède. Paul-René Martin sera également député au Grand Conseil, de 1978 à 1987, où il tente d’adopter une position médiane par apport à la question des économies d’énergie qui commence à défrayer la chronique dans le sillage des deux chocs pétroliers, et conseiller national, de 1987 à 1991. Il préside le parti radical vaudois de 1980 à 1984.

Martin représente un radicalisme très citadin, par son approche plus « gauchisante » des problèmes sociaux et écologiques. Il refuse, à l’instar de son ami Raymond Junod qui s’impose au Conseil d’Etat et au Conseil national, de faire la part trop belle à l’économie et privilégie l’équilibre des intérêts, sous le magistère de la culture. Car Paul-René Martin apparaît comme une figure originale du radicalisme vaudois par son amour pour la poésie, socle des ambitions culturelles qu’il affiche pour sa ville. Auteur d’un recueil de poèmes paru en 2000, Pensées vagabondes, il laisse par la même occasion transparaître ce qui cisèle son « radicalisme de gauche ». Volontiers porté à la méditation, ses vers expriment une sensibilité philosophiquement romantique, chantant la « logique de l’illogique », « l’être libre de vivre pour lui-même ». Un sentiment romantique qui ressurgit lorsque l’ancien syndic affirme que « le rêve est permis devant l’étang des lois et des conventions »: l’harmonie demeure inexorablement l’objectif ultime, au-delà du chaos du réel. Cette dimension romantique, qu’il aurait sans doute approfondie dans un texte à peine amorcé au moment de son décès, n’a-t-elle pas orienté le syndic poète, en définitive, vers des contrées peut-être trop éloignées de la synthèse hégélienne, entre rationalisme et romantisme, que Druey postulait plus de 150 ans auparavant? Paul-René Martin est enlevé brusquement au printemps 2002.

© Olivier Meuwly, Lausanne 2003

Publié le 1 janvier 2023

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